La Plénitude en Christ

La Plénitude en Christ

La Plénitude en Christ

Il restaure mon âme, il me conduit dans les sentiers de la justice, à cause de son nom. Psaume 23.3

En tant que fils de pasteur nazaréen, tout au long de mon enfance l’église chantait l’hymne « La Merveilleuse grâce de Jésus ». J’entends encore ces paroles : « Plus haute que les cieux, plus profonde que la mort. Plus grande que mes fautes clouées sur la croix. La grâce satisfait mon âme par le plein salut. La grâce qui mène au ciel. C’est la merveilleuse grâce de Jésus. »[1] Le conducteur de la louange tenait le recueil de chants dans une main tout en levant l’autre main avec enthousiasme pour entraîner l’assemblée. La chorale se divisait en deux groupes ; leurs voix s’élevaient en chantant ces paroles encore et encore. Exultant et les mains levées en signe de victoire, l’assemblée terminait à l’unisson : « Je louerai ton nom béni pour l’éternité ». Quelles paroles profondes ! Quelle vérité éternelle ! Quel don immérité !

La vie chrétienne est un pèlerinage, un long chemin d’obéissance, un parcours fait d’apprentissages constants et une expérience formatrice qui est enrichie à chaque pas par l’action de la grâce merveilleuse de Dieu. Cette grâce, qui œuvre par l’Esprit pour nous rendre conscients de nos péchés, est rendue efficace par notre foi au sacrifice du Christ pour notre salut et notre sanctification et elle continue à agir dans nos vies jusqu’à notre glorification. Vivre à l’image de Jésus est un défi quotidien, et c’est le parcours de la grâce.

Le chemin vers la plénitude : Le but de Dieu pour chaque croyant

Par ce chemin, « celui qui a commencé en vous cette bonne œuvre la rendra parfaite pour le jour de Jésus-Christ » (Philippiens 1.6). L’église de Philippes est la première communauté chrétienne établie par Paul en Europe de l’Est. Malgré les difficultés auxquelles les croyants étaient confrontés dans cette ville, ils formaient une église exemplaire, fidèle et généreuse. Ils croyaient en Jésus et témoignaient de leur foi malgré l’hostilité environnante. Mais lorsque Paul leur écrit sa lettre, il leur révéla qu’il était profondément convaincu que le Seigneur était encore et toujours à l’œuvre en eux.

Quand nous pensons que nous avons déjà atteint un certain niveau spirituel, Dieu ajoute une nouvelle étape sur le chemin qui nous permet de grandir. Le chemin du croyant vers la plénitude de vie n’est jamais statique mais toujours entouré d’expériences nouvelles et dynamiques.

Durant son ministère public, Jésus a clairement manifesté son objectif de rédemption lorsqu’il a dit : « Je suis venu afin que les brebis aient la vie, et qu’elles l’aient en abondance » (Jean 10.10). Les premiers chapitres du livre de la Genèse montrent le contraste entre la perfection de l’acte de création (démontrée par la conception divine de toutes choses au sein d’une vie harmonieuse, fructueuse et entière) et la tragédie du péché qui a tout abîmé. Le péché a non seulement altéré le domaine spirituel, mais a aussi altéré l’harmonie de toutes les relations des humains : la relation des humains avec Dieu, des humains avec eux-mêmes, avec leur prochain et avec la création.

Mais Dieu n’est pas resté paralysé face aux ravages du péché. Son plan divin a continué avec force pour racheter toute sa création (Colossiens 1.20) et transformer la vie humaine dans toutes ses dimensions afin que tous (sans distinction de nationalité, de culture, de race, de genre ou de statut social) puissent connaître la plénitude de la vie que Dieu a rendue possible par Jésus-Christ dans la puissance de l’Esprit.[2]

Le discipulat chrétien : Une manière de vivre

« … Croissez dans la grâce et dans la connaissance de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ » (2 Pierre 3.18)

Qu’est-ce qui distingue un disciple du Christ ? Les marques du disciple sont la confession radicale que Jésus-Christ est Seigneur de toute sa vie et l’engagement à le suivre fidèlement chaque jour (Romains 10.9). En termes wesleyens, c’est l’essence de la perfection chrétienne qui désigne « la pureté d’intention, vouant toute sa vie à Dieu. C’est le don de notre cœur tout entier à Dieu ; c’est un seul désir et un seul projet qui conduit toutes nos humeurs. »[3]

Selon cette perspective, le discipulat chrétien n’est pas uniquement l’expérience intellectuelle d’un endoctrinement dans les rudiments de la foi mais c’est une façon de vivre selon l’Esprit qui accompagne le croyant, le transformant à l’image du Seigneur par sa grâce sanctifiante.

Si Dieu nous a donné sa grâce imméritée pour nous faire grandir, alors quel est notre rôle ? Devrions-nous attendre de manière passive que sa grâce soit rendue parfaite en nous ? Au contraire, étant conscients du plan divin qui vise à nous transformer de gloire en gloire (2 Corinthiens 3.18) nous devons rechercher de manière intentionnelle tous les moyens que Dieu peut utiliser pour opérer cette transformation.

Pour Wesley, les moyens de grâce sont des canaux divins par lesquels Dieu communique ses dons immérités et nous aide à guérir toutes les choses qui ont été déformées par le péché.[4] Dans ce sens, la pratique des moyens de grâce devient source de croissance. Sur ce chemin, le croyant n’aspire pas à devenir indépendant par rapport au Maître. Au lieu de cela, au fil de la progression du croyant dans ce pèlerinage, il ou elle découvre que le plus grand de ses besoins est de connaître la présence et la grâce divine du Maître. La maturité chrétienne se distingue par une dépendance toujours plus grande et absolue envers Jésus.

Grâce et souffrance : Compagnons de pèlerinage

« …ce qui m’est arrivé a plutôt contribué aux progrès de l’Évangile. » Philippiens 1.12

Établir un lien entre la grâce et la joie ou la souffrance semble être une contradiction car nous vivons dans un monde qui résiste à toute souffrance. Nous fuyons les situations qui pourraient nous causer un inconfort, et bien souvent nous mesurons la qualité de notre vie spirituelle par l’absence de difficultés. Nous n’avons pas appris à apprécier la contribution que la vallée de la souffrance peut apporter à notre maturité.

Le Nouveau Testament donne plusieurs exemples de souffrances qui sont des instruments divins pour le perfectionnement de la vie chrétienne (Romains 8.18 ; 1 Pierre 1.7 ; Hébreux 11.39-40). Jacques décrit clairement la réaction en chaîne formée par les épreuves, la foi et la patience et qui contribue à notre perfectionnement et à notre plénitude (Jacques 1.2-4). Il est nécessaire de préciser que cela ne signifie pas que le croyant doive rechercher à faire pénitence afin d’être purifié sur le plan spirituel ; au lieu de cela, il ou elle doit croire en un Dieu souverain et présent qui marche avec nous et qui utilise les situations les plus douloureuses comme des moyens de former notre caractère. Et c’est aussi là une preuve de sa grâce.

Quand Paul écrit sa lettre aux Philippiens, il est en prison et sait qu’il pourrait y perdre la vie. Il souffrait pour la cause de l’Évangile et pourtant il reconnaissait que tout ce qui lui était arrivé avait un but ultime plus grand. Souffrir sans reconnaître que Dieu a son propre plan nous amène au désespoir, mais voir sa présence même à travers le brouillard de notre douleur nous donne le repos tandis qu’Il nous affine et nous perfectionne par sa grâce.

Notre appel le plus élevé : Être semblable à Christ

Le cœur de l’épître aux Philippiens est l’hymne christologique que l’on trouve aux versets 5 à 11 du chapitre deux qui résume magistralement l’incarnation, l’œuvre, la mort, la résurrection et l’exaltation du Seigneur. Paul implore les croyants de Philippes d’imiter la même attitude (2.5) en demeurant fidèles (1.27-30), dans l’harmonie et l’humilité (2.2-3).

Atteindre « la mesure de la stature parfaite de Christ » (Éphésiens 4.13) est le but de tout chrétien et c’est pourquoi sa grâce continue à agir dans tous les domaines de notre vie. Ainsi, « le plan divin n’est pas uniquement accompli par la nouvelle alliance… mais aussi par la restauration de l’image divine commencée à la régénération, continuée dans l’entière sanctification et qui se conclura dans la glorification… Bien que la transformation finale soit encore à venir, le Saint-Esprit œuvre de manière effective dès maintenant en chaque disciple du Christ pour le rendre semblable au Christ. »[5]

Jésus est l’unique modèle des Chrétiens du fait de sa vie sainte qu’il a offerte en sacrifice par amour pour l’humanité et de la cohérence parfaite entre sa prédication adressée aux hommes et l’attention qu’il portait aux besoins humains. C’est pour cette raison que l’appel à la sainteté à l’image du Christ n’est pas un appel solitaire, individualiste dont la portée serait exclusivement personnelle. Par leur vie transformée par la grâce de Dieu et dans la puissance de l’Esprit, les disciples rendent leur maître visible et annoncent la Bonne Nouvelle de façon complète : non seulement par leurs paroles mais aussi par l’amour qu’ils ont les uns pour les autres. Lorsque nous désirons être semblables à notre Maître, nous nous approprions les paroles de l’hymne de Charles Wesley, « Le Seul amour divin exalté » en demandant au Seigneur :

Maintenant accomplit ta promesse, donne-nous la purification ;

Abrités en toi, fais-nous voir le plein salut

Emporte-nous de gloire en gloire jusqu’à la demeure céleste

Et là devant toi prostrés, nous te donnons notre dévotion.[6]

 

Aucune méthode ni action humaine ne suffirait à payer pour notre salut, notre sanctification et notre croissance vers la plénitude. Seule la grâce merveilleuse et gratuite de Dieu nous permet de recevoir ce don par l’œuvre parfaite du Christ.

Marchons donc avec foi et fidélité vers cet appel. Dieu exécute son plan éternel pour nous perfectionner dans ce pèlerinage et sa grâce est à l’œuvre en nous par son Esprit.

Jorge Julca est président du Séminaire théologique nazaréen de Pilar en Argentine et coordinateur régional de l’éducation pour la région Amérique du Sud.

 

1. Haldor Lillenas, Wonderful Grace of Jesus, 1918. Note de traduction : Ce texte est une traduction de la version espagnole de l’hymne. Il ne correspond pas exactement aux paroles originales en anglais.

2. René Padilla et Harold Segura, responsables d’édition. Ser, hacer y decir: bases bíblicas de la misión integral, Editorial Kairós, Buenos Aires, Argentine, 2006, p. 8.

3. Notre de traduction : Il s’agit du paragraphe 27 d’Une exposition claire et simple de la perfection chrétienne de John Wesley. L’article cite la version espagnole de cet ouvrage.

4. John Wesley, Œuvres de Wesley Volume I. Sermon : Les Moyens de grâce. Wesley Heritage Foundation Inc, Caroline du Nord, États-Unis, p. 313-332. Édition espagnole.

5. John Knight, In His Image, Nazarene Publishing House, Kansas City, Missouri, États-Unis, 1979, p. 166.

7. Note de traduction : L’article cite la version espagnole de l’hymne Love Divine, All Loves Excelling de Charles Wesley, qui ne correspond pas exactement à la version originale de l’hymne en langue anglaise.

Public